MY OWN PERSONAL VAUDOU 1 - 2012

L’art est un soin.
Le chaman et l’artiste ne font pas le même travail, mais ils sont sur un chemin semblable. Là où le Marakame produit un soin particulier, l’artiste jette un soin dans le monde. Par ce geste universel, il tente de réorganiser le désordre de l’existence. Pour lui-même un peu, pour les autres beaucoup. L’artiste trace un chemin dans le chaos, où souvent il se blesse lui-même. Mais l’œuvre qu’il met au monde, cette organisation particulière de la matière et du sens, permet à ceux qui la reçoivent, parfois, d’éprouver une émotion.
Cette émotion, c’est le soin.

Les objets présentés ici sont la représentation de certaines puissances intérieures. Des génies familiers, comme celui que Socrate appelait son daîmon, et qui, lors de courtes extases, venait lui souffler des intuitions. D’autres encore, selon le temps et la géographie, les appellent des esprits, des djouns, des zars, des revenants, ou des voix… Selon C.G. Jung, ce sont des complexes. Au sens de constructions complexes du psychisme, et dont il a montré qu’elles possédaient une certaine autonomie. Leur donner une apparence, les faire venir au monde, les nommer, les extraire du brouillard inconscient et les séparer les unes des autres, c’est décider d’entretenir avec elles un échange respectueux, magique et thérapeutique, et d’établir avec ces forces une relation intelligente et pacifiée.

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MY OWN PERSONAL VAUDOU 2 - 2013

Les mues psychiques.

En mai 2012, lors de My Own Personal Vaudou 1, développant l’idée que l’Art est un soin, j’avais présenté des personnages-totems, qui incarnaient des choses aussi abstraites que des névroses, des complexes, des nœuds psychiques. Je leur avais confié pour l’année à venir la responsabilité de mon équilibre intérieur. Á eux de gérer angoisses et chagrins, excès, rêves, désirs, attentes… Á eux d’établir la paix et le silence.
Moi, j’avais besoin de repos.

Mai 2013, My Own Personal Vaudou 2.
Ces vaudous, je les ai laissé agir en moi, comme des insectes dans le bois, comme des vers dans le Soi. Magie de l’Art, efficience du lâcher prise, puissance de l’Own Personal Vaudou 1, mes chagrins ont pris une autre forme, mes doutes ont muté, certains semblent avoir disparu. J’ai imaginé les traces qu’ils avaient pu laisser, les cocons de leurs sublimations, les mues de leur corps sans corps, les suaires légers de leur ancienne présence, par lesquels, en creux, on devine leur essence.
Des reliques dans lesquelles, peut-être, d’autres esprits viendront faire leur nid ; on n’est à l’abri de rien.


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MY OWN PERSONAL VAUDOU 3 - 2014

En cas de douleur.
(Mal au corps, mal à l’âme, aux esprits, algies diverses, névroses.)

Extraire la douleur, l’arracher de soi et lui donner forme. La désassembler, la dénouer, l’étirer ; la réassembler, la renouer, lui faire un corps, tordu, difforme, prototype, comme il vient.
Confectionner des bijoux, des colliers de perles, des joyaux simples et colorés, des amulettes contenant du sens caché, des secrets. Les offrir à la douleur, la parer puis l’allonger sur un coussin qu’on aura cousu afin qu’elle y soit confortable, accueillie, qu’elle s’y repose, heureuse et embellie. Embellie, tout est là.
(Éventuellement la nommer.)
Parler avec elle, l’écouter, la comprendre, être doux — il n’est pas impossible que la douleur ait souffert elle-aussi. User du regard, longtemps.
Être patient, négocier.
Ainsi incarnée et radieuse, entendue et sublimée, il n’est pas impossible que la douleur offre en retour : des surprises.

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